Allons enfants

Si le rap est sorti du ghetto culturel, on ne peut pas en dire autant de ceux qui l’écoutent et de ceux qui le dansent. Une frange de la jeunesse française, noire et maghrébine, le plus souvent pauvre, continue de vivre à l’écart, dans des banlieues dont on comprend de moins en moins ce à quoi les jeunes aspirent.

C’est pour donner une chance à quelques-uns d’entre eux qu’a ouvert, en plein cœur de Paris, une filière unique. Tous les mois de septembre, une cinquantaine d’élèves issus des Zones d’Éducation Prioritaires se retrouvent au lycée Turgot. Ils n’ont qu'un point commun : leur amour de la danse hip-hop. Acceptés exceptionnellement pour poursuivre leur scolarité à Paris, ils vont essayer de décrocher leur baccalauréat et, dans le même temps, de devenir les « meilleurs danseurs de France ». Pendant leurs années de lycée, ces jeunes, la plupart défavorisés et issus de la banlieue, vont profiter des enseignements de professionnels, chorégraphes, sociétaires de la Comédie Française ou autres artistes du Centre National de la Danse, qui vont les pousser à donner tout ce qu’ils ont, tout ce qu’ils ont l'habitude de taire. Au fil des semaines, ils vont apprendre les ressorts subtils de l’expression corporelle, du jeu, de l’écriture et vont tenter de s’affirmer, de se révéler aux autres autant qu'à eux-mêmes.

L’aventure de ces adolescents est née d’un rêve, d’une utopie, portée par un professeur fou de hip-hop. Persuadé de pouvoir retisser du lien entre une partie de la jeunesse et l’école, il décide de lancer, un peu seul, cette idée de classe hip-hop. Les belles aventures sont souvent le fruit de belles rencontres. David, le prof, rencontre Christophe, un proviseur iconoclaste pour qui rien ne vaut l’épanouissement des « gamins » dont il a la charge. Les deux sont aussi différents qu’habités par des convictions humanistes et une volonté farouche de créer du lien social.

Avec leur professeur de danse hip-hop, David Berillon, « B. » comme ils l’appellent, les adolescents vont, tout au long de l’année scolaire, s’entraîner dur et se perfectionner, malgré la tempête qui gronde parfois dans leurs têtes. Des blessures psychologiques, un sentiment de relégation sociale, de solitude, un vague à l’âme qu’à travers la danse, ils vont progressivement apprivoiser pour mieux les exploiter. Dans la danse, ils vont puiser l’essence de leur vie d’artistes.